Assemblées générales : Décider sans se réunir pendant la crise sanitaire

La technologie au secours de la convocation et de la tenue des assemblées générales dans la crise sanitaire.
 

Dans le rapport présenté au Président de la République, préalable à l'adoption de l'Ordonnance portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé,
Il est logiquement mis en évidence la "difficulté – si ce n’est l’impossibilité – de se réunir en raison des mesures prises pour lutter contre la propagation du Covid 19".
C'est dans cette perspective qu'un ensemble de mesures visant à "satisfaire l’objectif de continuité et de sécurité juridique du fonctionnement des groupements de droit privé dans leur diversité et leur variété", a été adopté par voie d'ordonnance le 25 mars 2020.

Avant de les présenter, il convient de les mettre en perspective avec les dispositifs légaux préexistants, tout au moins en ce qui concerne les groupements de droit privé les plus nombreux, à savoir les associations, les sociétés civiles et les sociétés commerciales.

Le dispositif légal de droit commun fait donc déjà une large part à la faculté pour chaque membre des organes compétents de prendre des décisions sans être physiquement présents
.La pertinence de l'ordonnance du 25 mars 2020 est davantage dans le plein effet qu'elle donne aux moyens dématérialisés de prise de décisions lorsque ces moyens n'ont pas été prévus dans les stipulations statutaires ou extrastatutaires.
Plus qu’une révolution, elle vient donc conforter une pratique qui s’était déjà installée et qui va probablement s’intensifier après la crise sanitaire.

Associations et sociétés civiles et visioconférence

Pour la plupart des associations et les sociétés civiles, que l'on pourra définir comme ressortant d'un droit commun, il n'existe aucune obligation légale de tenir, pour les organes délibérants, une réunion afin de prendre des décisions y compris pour celles relevant de la compétence des associés. Elles pourront dès lors être mises en oeuvre (on pense aux convocations et communications préalables des documents se rapportant à l'ordre du jour) et prises par tous moyens utiles, en ce compris par visioconférence ou télétransmissions, au moyen d'un vote organisé par correspondance ou selon acte sous seing privé, à condition toutefois que leurs statuts le prévoient.
A défaut, les mesures prises dans l'ordonnance retrouveront naturellement tout leur intérêt.

SAS et visioconférence

Idem, en ce qui concerne, les sociétés par actions simplifiée, lesquelles constituent à ce jour la forme de société commerciale la moins réglementée.
Cette liberté contractuelle, qu'il convient encore une fois de valider préalablement par une lecture attentive des statuts, n'est pas de mise pour les sociétés anonymes et les sociétés à responsabilité limitée, qui sont les formes de sociétés commerciales les plus répandues avec la société par actions simplifiée.

SARL et visioconférence

S'agissant de la société à responsabilité limitée tout d'abord qui ne comprend en règle générale qu'un organe délibérant, les décisions concernant l'approbation annuelle des comptes ou décidant l'émission d'obligations sont obligatoirement prises en assemblée générale (elles peuvent l'être également sur l'initiative des associés représentant à la fois 10% des associés et 10% des parts sociales). S'agissant des modalités de tenue de l'assemblée générale, il est possible de participer aux débats et au vote par visioconférence ou télécommunication si les statuts le prévoient.

SA et visioconférence

Les sociétés anonymes présentent la particularité d'avoir au moins deux organes délibérants ; les membres d'un Conseil d'Administration ou d'un conseil de surveillance peuvent utiliser la visioconférence ou les moyens de télécommunication pour participer aux débats et au vote si un règlement intérieur le prévoit, à l'exception notoire des réunions ayant pour objet les comptes annuels étant précisé qu'il est désormais possible que les administrateurs se prononcent par voie de consultation écrite mais sous les mêmes réserves.
Concernant les assemblées générales et à l'exception de la consultation écrite, les mêmes possibilités sont offertes, si les statuts le prévoient, auxquelles s'ajoute la possibilité de voter par correspondance.

Le dispositif légal de droit commun fait donc déjà une large part à la faculté pour chaque membre des organes compétents de prendre des décisions sans être physiquement présents.

La généralisation de la visioconférence pendant le confinement

La pertinence de l'ordonnance est davantage dans le plein effet qu'elle donne aux moyens dématérialisés de prise de décisions lorsque ces moyens n'ont pas été prévus dans les stipulations statutaires ou extrastatutaires des "groupements privés" (ainsi les communications, donc les convocations, pourront valablement s'effectuer par message électronique ; cf article 3) et aussi dans la faculté de permettre l'organisation d'assemblée sans même "que les membres et les autres personnes ayant le droit d’y assister ne soient présents physiquement ou par conférence téléphonique ou audiovisuelle".

Les modalités de la mise en oeuvre de cette mesure, véritablement exceptionnelle, ne vont pouvoir trouver à s'appliquer que "lorsqu’une assemblée est convoquée en un lieu affecté à la date de la convocation ou à celle de la réunion par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires" et si "les membres de l’assemblée et les autres personnes ayant le droit d’y assister sont avisés par tout moyen permettant d’assurer leur information effective de la date et de l’heure de l’assemblée ainsi que des conditions dans lesquelles ils pourront exercer l’ensemble des droits attachés à leur qualité de membre ou de personne ayant le droit d'y assister".
Pour rendre cette mesure encore plus souple, cette faculté peut être exercée par le représentant légal du groupement sur délégation de l'organe compétent pour convoquer.
La décision sera régulièrement prise si les membres qui "participent ou votent à l’assemblée selon les autres modalités prévues par les textes qui la régissent tels qu’aménagés et complétés le cas échéant pas la présente ordonnance".

Une interrogation subsiste toutefois en ce qui concerne les prises de décisions obligatoirement en assemblée, l'article 4 de l'ordonnance ne prévoit pas explicitement que ces décisions s'appliquent "quel que soit l’objet de la décision sur laquelle l’assemblée est appelée à statuer" comme cela est indiqué aux articles 5, qui prévoit "la participation aux assemblées par une conférence téléphonique ou audiovisuelle" ou 6 qui dispose que "les décisions des assemblées peuvent être prises par voie de consultation écrite de leurs membres" sans "qu'une clause de statuts ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s'y opposer."

On peut en conséquence et par exemple s'interroger sur la faculté en ces circonstances exceptionnelles de faire approuver des comptes annuels à l'assemblée par voie d'acte d'avocat sous forme électronique.

A noter que l'organe de convocation peut, trois jours avant la date de l'assemblée, opter pour l'une quelconque des formules proposées aux articles 4, 5 et 6.

Les mêmes facultés de décisions par voie de conférence téléphonique ou audiovisuelle ou de consultation écrite sont réservées aux délibérations des organes collégiaux d'administration, de surveillance et de direction (article 8 et 9), ; elles s'appliquent également à l'arrêté des comptes annuels et plus largement aux opérations préalables à l'approbation des comptes annuels par les membres du groupement puisqu'il est précisé que ces modes de prises de décisions sont applicables "quel que soit l’objet de la décision sur laquelle l’organe est appelé à statuer.

L'ensemble du dispositif est effectif pour toutes les assemblées appelées à statuer à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 31 juillet 2020, sauf prorogation par décret.

Naturellement, les convocations par courriels ou conférences audiovisuelles ou téléphoniques devront présenter un degré de fiabilité technique suffisant pour que les droits de chacun (notamment d’information préalable) soient respectés. 

Télétravail et fonctionnement des institutions représentatives du personnel

Pour l'heure, il n’existe pas pour l’instant d’interdiction générale et absolue de déplacements; le fonctionnement « normal » des institutions représentatives du personnel devrait pouvoir se poursuivre, à condition de bien respecter les mesures « barrière » mises en place par les pouvoirs publics.

Cependant, et bien que non visés par les dispositions précitées, vous pouvez également envisager de privilégier la visioconférence pour les réunions du Comité Economique et Social.
Le recours à la visioconférence pour les réunions  du Comité Economique et Social est prévu par l'article L.2315-4 du Code du travail.
"Le recours à la visioconférence pour réunir le comité social et économique peut être autorisé par accord entre l'employeur et les membres élus du comité. En l'absence d'accord, le recours à la visioconférence est limité à trois réunions par année civile."
 Dans le cadre des mesures de prévention de la propagation du coronavirus et compte tenu de l'urgence, l’employeur peut mettre en place une visioconférence ou tout autre procédé de communication à distance pour ceux des représentants du personnel ne pouvant ou ne voulant pas se rendre sur le lieu de travail, sans l'accord du CSE dans la limite de trois réunions.

Attention l’employeur n’en est en aucun cas dispensé du respect de ses obligations de consultation des représentants du personnel du fait des mesures de confinement.

Rappelons que les groupements de droit privé, qui étaient en cours d’approbation des comptes annuels lorsqu’est survenue l’épidémie, pourront reporter de trois mois le délai légal ou contractuel de tenue de l'assemblée générale devant les approuver, à la condition toutefois que le commissaire aux comptes dudit groupement n’ait pas établi son rapport au 12 mars 2020.

A contrario, pour les organismes n’ayant pas désigné de commissaire aux comptes, le délai pourra être librement prorogé.

Plus qu’une révolution, elle vient donc conforter une pratique qui s’était déjà installée et qui va probablement s’intensifier après la crise sanitaire.
En la matière donc, le provisoire est peut être appelé à durer...

N’hésitez pas à nous contacter pour la mise en œuvre de votre assemblée générale ou conseil d’administration en visioconférence, le cabinet d'avocats Themis vous y aider.
En effet, bien que la loi vous autorise à reporter votre assemblée générale annuelle, la prise de certaines décisions urgentes peut devoir être maintenue.

Attention, bien qu'aucun texte n'ait été pris pour l'instant, Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, a appelé, ce lundi 30 mars, les entreprises en général et en particulier celles ayant recours à des mesures de chômage partiel, à ne pas verser de dividendes, sous peine de retrait des aides d'Etat..



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